Thérapeute, charlatan & gourou

C’est dans le cadre d’une discussion sur un projet de loi relatif au médicament que l’assemblée nationale avait voté le jeudi 11 janvier 2007, contre l’avis du gouvernement, deux amendements visant à rendre obligatoire, pour les professionnels qui utilisent le titre de psychothérapeute, une formation exclusivement universitaire.

Le vote de ces amendements étaient intervenu au moment où le gouvernement s’apprêtait à publier, après de longues négociations avec les organisations représentant ces professions, un projet de décret d’application de l’article 52 de la loi du 09 août 2004 qui réglemente l’usage du titre de psychothérapeute. Ce décret prévoit une formation spécifique en psychopathologie clinique de quatre cents heures de cours théoriques et un stage pratique de cinq mois minimum.

Outre le fait que le vote de ces deux amendements étaient des “cavaliers législatifs” (cheval de Troie dans la procédure législative), ils marquaient la volonté du groupe parlementaire UMP, et surtout celle de son Président, d’éloigner de la profession les charlatans et autres gourous qui utilisent ce titre, soit à des fins de prosélytisme sectariste, soit d’une façon abusive en trompant ceux qui se trouvent dans une situation de désarroi ou de perplexité psychologique.

C’est à l’unanimité que le Sénat a voté le 25 janvier 2007 le retrait de ces deux amendements. La décision finale appartiendra à l’Assemblée nationale après avis d’une commission mixte paritaire.

Il est tout de même troublant de voir la désinvolture avec laquelle nos parlementaires traitent la santé mentale en cette fin de législature. Alors que tous fourbissent leurs armes dans la perspective d’un combat qu’ils espèrent bien gagner, ils tentent de brader à l’ombre d’obscures procédures parlementaires les débats que la société souhaite voir poursuivre pour tenter de parvenir à un mieux être.

Personne ne niera le fait qu’il faille garantir à la population la sécurité de pouvoir confier à des professionnels consciencieux et bien formés leur santé et leur bien être psychique. Mais beaucoup pensent, à juste titre, que les psychothérapeutes et les psychothérapies ne peuvent se nourrir que de courants de pensée différents venus d’horizons divers. Aucune volonté soignante digne de ce nom n’aspire à plonger le patient dans un état qui serait pire que celui qui l’aurait amené à consulter un psychothérapeute.

La diversité des points de vue et la confrontation des idées ont depuis longtemps permis de progresser dans le traitement de la souffrance psychique, et, finalement, vouloir enfermer la psychothérapie dans une formation calibrée unique ne conduirait sans doute qu’à une autre forme de sectarisme qui étoufferait tout ce que le psychisme humain recèle de richesses, de possibilités et de potentialités.

La question reste donc pour l’instant en suspens. Il appartiendra à la prochaine assemblée de légiférer sur ce thème et de trouver un compromis bien négocié où toutes les parties trouveront leur compte et dans laquelle le patient ne sera pas abandonné aux mains de quelque idéologie devenue incontournable.

Soins Psychiatrie N°249, Mars/Avril 2007, page 8. 

liberté
Votre Espace de Réflexion & de Recherche

Suivez-nous